Beauté du style, beauté du souffle traversent ces 84 pages.
Fort et puissant, ce livre est troublant, d’une intensité redoutable et possède un rythme auquel il faut se laisser aller.
Le fil, le labyrinthe, rappellent, certes Ariane mais ici le fil va servir de guide aux désirs. La narratrice doute, fait face à ce qui la tourmente. Elle avance, pas à pas, retenant sa respiration sur ce qu’elle pressent, donnant place au temps, aux mots, libérateurs et nécessaires, aux sens. La typographie utilisée donne le rythme de lecture, imposant les pauses, les respirations, les silences nécessaires mais également nous fait ressentir la tension sous-jacente. Le chemin vers le désir, malgré les peurs ancrées, elle va Vers !
Ce roman-poésie est une longue respiration, faite d’hésitations, de troubles, de suspensions, de cadences, tantôt éprouvantes, tantôt légères. C’est un souffle, puis un feu. Le lecteur palpite et frissonne avec elle et tout résonne en nous. Le corps de la narratrice vibre, tremble, se dirige vers des abysses, vacille et trouve le feu.
Mélanie Leblanc nous offre un lâcher-prise sur cet ancestral et intrinsèque désir, franchit des horizons, dépasse les murs. Somptueux voyage au pays du désir féminin : quête de liberté, exacerbée et tenace, quête de l’autre et tous les éléments.
Le style est somptueux. Hachuré, clairsemé d’espaces ou fluide, il donne de la voix, de la force, de l’intensité à ce Labyrinthe des jours. Ode-Poésie à faire frissonner d’envie.
Patricia Bouchet
Qui est l’auteure ?
Mélanie Leblanc est née à Rouen en 1980. Elle enseigne la littérature et le cinéma au lycée Senghor d’Évreux.
Elle anime régulièrement des ateliers d’écriture et donne de nombreuses lectures publiques. Elle s’investit dans la Chouette association, dont le but est de favoriser le développement d’ateliers d’écriture d’auteurs.
Elle s’intéresse aux liens entre la poésie et la musique, les arts visuels, le cinéma. Elle a traduit les poèmes de Karen Dalton (chez Littérature mineure) et elle est l’autrice de Des falaises (Cheyne) et Presque je vole (Littérature mineure), ainsi que de nombreux recueils aux éditions Les Venterniers dont Des étoiles filantes et Les gens qui osent ou Quand mon cœur. (Source Le Castor Astral)
La parole à l’auteure : D’où vient l’idée d’écrire ce Labyrinthe des jours ?
« Le Labyrinthe est un mythe qui me fascine depuis des années. Comme tous les mythes, il parle à quelque chose de très profond en nous. Celui-ci est un mythe initiatique. Un jour, je me suis rendu compte que c’était un mythe dans lequel je m’identifiais davantage au héros qu’au personnage féminin. Qu’est- ce que cette femme qui attend à l’entrée, qui aide le héros et en plus se fait abandonner. Je me suis dit alors qu’il fallait changer les histoires pour changer les mentalités. J’ai donc décidé de faire entrer Ariane dans le labyrinthe, ce qui me semblait en écho avec ce que j’avais pu lire, découvrir sur la société grecque. C’est-à-dire que nous, on a la mythologie d’une population patriarcale mais qui a dominé une population matriarcale et qui a emprunté certains de ses mythes et ajouté Zeus. Il y a notamment le mythe du Labyrinthe qui dans le monde entier existe sans le Minotaure et sans Thésée. C’est donc un mythe plutôt féminin avec la grotte, l’antre, qui est l’utérus. D’où mon envie que le personnage féminin, Ariane, se réapproprie la puissance du féminin à travers son errance dans le labyrinthe. Ça a fait écho aussi à la façon qu’ont les femmes de vivre leurs histoires d’amour, ces femmes capables d’attendre, d’espérer des rencontres. Je crois que ces façons de vivre l’amour ne me conviennent plus et je l’ai découvert au cours de l’écriture. De mettre toujours l’autre en premier ça ne m’allait pas, et qu’il fallait d’abord essayer de s’aimer soi .»