Une proposition de lecture par Patricia Bouchet
Un écrin d’écriture qui prend place dans une nature aussi somptueuse qu’effrayante.
XIXe, au cœur d’une forêt du Jura, Aimée, une jeune femme, épouse, sous les conseils de son père, Candre, un jeune homme riche, attentionné quoi que sobre en émotions, gorgé de foi et peu enclin à la gaité. Il apparaît pourtant aux yeux de cette dernière, différent des hommes de son époque.
Orphelin très jeune, il est élevé par la servante Henriaet son propre fils, Angelin. Peu de temps après ses noces, sa première épouse meurt. Aimée, immergée et réceptive au mystère de ce lieu, commence à s’interroger sur les circonstances de ce décès.
La noirceur du ou des secrets se détricote doucement en écho à l’ambiance effrayante qui monte au fil des pages. Le talent de Cécile Coulon réside, entre autres, dans cette montée crescendo. Dans cette nature omniprésente aussi somptueuse que terrifiante, rôde le fantôme de l’ancienne épouse, l’omniprésence de la servante, se dessine le portrait de son fils Angelin. Emeline, professeur de musique, qui déclenchera, à son insu, le dénouement.
Le roman est construit en trois parties, aux titres évocateurs :
Le cœur – La langue -Le ventre.
Le corps est dans ce roman objet de troubles, de désirs, de souffrances, en particulier celui des femmes. Il est comme un personnage principal, réceptacle des maux, des secrets et c’est par lui et avec lui que se termine l’intrigue. La place des femmes dans un rôle de soumission, d’abnégation révèle l’époque et teinte le roman. Oui, il y est question d’hommes, de désirs mais ce qui se tisse dans ses murs, reste des histoires de femmes,d’alliances, de trahisons, de vengeances. L’éveil au désir d’Aimée est initié grâce à une femme, le dénouement est rattaché à une femme et les dernières pages sont des paroles de femmes.
L’écriture magistrale, soignée, ciselée et riche de Cécile Coulon nous attrape, nous fait craindre … « à la Daphné du Maurier ».
Une lecture palpitante et éblouissante où les murs embaument le mystère et les personnages suintent les secrets.
Ce qui était inquiétant devient terrifiant.