Louis Dieuzayde est maître de conférences en esthétique théâtrale au sein du département Arts, membre du Laboratoire d’Études en Sciences des Arts (LESA, UR 3274) d’Aix-Marseille Université et président du Théâtre Antoine Vitez à Aix-en-Provence.
Ses recherches portent sur les mutations du jeu de l’acteur en relation avec le renouvellement des écritures et sur l’esthétique théâtrale actuelle. Il a ainsi publié de nombreux articles et dirigé trois ouvrages : Le Théâtre de Valère Novarina. Une scène de délivrance ; Le langage s’entend mais la pensée se voit ; Arts, transversalités et questions politiques aux Presses Universitaires de Provence (PUP) et il est membre du comité de rédaction de la revue Incertains regards.
Également praticien, il réalise régulièrement des mises en scène et des lectures théâtrales avec les étudiants de la section Arts de la scène : Une nuit arabe de Roland Schimmelpfennig, A bouche que veux-tu ! à partir de fragments de Mort à crédit de Louis-Ferdinand Céline, L’Espace furieux de Valère Novarina, État civil et Supervision de Sonia Chiambretto.
Louis Dieuzayde a répondu aux questions de Désirdelire
– Vous travaillez depuis plusieurs années sur les textes de Sonia Chiambretto : que représente-t-elle pour vous sur la scène contemporaine ?
L’œuvre de Sonia Chiambretto a la grande singularité de s’élaborer à l’intersection de la poésie, de l’art documentaire et du théâtre. Inscrite dans la lignée d’une poésie objectiviste, partant toujours de documents de nature diverse (témoignage, entretien, donnée sociologique, observation ethnographique de terrain, éléments de langage), l’autrice en dégage une épure poétique permettant d’appréhender autrement ces réalités premières et les donnant alors à penser comme désengluées de l’automatisme de leur perception. L’écriture se met le plus souvent à l’écoute des sans-voix. Ainsi, dans sa première trilogie, entend-on une jeune réfugiée tchétchène, un soldat de la légion étrangère et des religieuses slovaques exilées dans des couvents français. Ces scènes de parole, que l’autrice simultanément construit et met en procès, ne se structurent pas sur un évènement. Comme délestée du poids de l’intrigue dramatique, l’écriture se captive en revanche des modalités toujours particulières des tournures que prend la langue lorsque s’y joue un espace politique de tensions entre le majeur et le mineur, la domination et l’insoumission, lorsqu’elle révèle une dramaticité en elle-même éclairante de l’actualité du temps.
– Vos étudiants vont présenter une lecture : comment ce travail a-t-il été conduit ?
Depuis dix ans au moins, nous confions à Sonia Chiambretto la direction d’un atelier d’écriture qui est très fréquenté par les étudiant.e.s en arts de la scène. Par ses consignes, son empathie, son ouverture à toute sorte de façon d’habiter la langue ou d’être habité par elle, elle met au travail le langage comme les réalités observées et explore inlassablement les failles du langage à vouloir prendre d’assaut les réalités… Du moins peut-on entendre ce mouvement comme sa fragilité dans le montage textuel que vont lire les étudiant.e.s.
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